K a écrit :Ah tu as raison de le souligner, j'aurais pu donner un peu de contexte. Le mécanisme explicatif que j'ai déjà vu passer est le suivant : une personne consommatrice fait appel à un dealer régulier pour un produit. Elle contrôle sa consommation et sait donc combien de produit elle doit prendre. Un jour, son dealer lui apporte un autre produit. Cet autre produit est dosé autrement, voire est coupé, mais il a la même forme. Cette personne ne sait donc pas forcément que son produit a changé et prend donc la même dose que d'habitude et fait une overdose.
Il se trouve que les saisies de produits par les flics favorisent les changements de flux de stupéfiants : les personnes dépendantes doivent continuer à trouver des produits, et donc les dealers ont intérêt à pouvoir leur en fournir (ou sinon elles iront trouver un autre dealer, mais c'est le même principe).
À long terme, c'est pire encore : les saisies représentent un manque à gagner, et le choix des trafiquants se porte donc facilement sur des produits plus concentrés, donc plus discrets, qui seront coupés plus tard dans la chaîne (donc de manière moins industrielle, donc moins précise aussi). C'est un des mécanismes qui explique que le fentanyl soit de plus en plus présent (et il déclenche plus facilement des overdoses chez les usager.e.s).
L'explication alternative que tu proposes (un mode commun entre les deux évènements) est possible, mais ça m'a l'air limité pour les raisons suivantes :
- je ne comprendrais pas trop qu'il y ait de grosses variations dans les flux de drogue, hors activité policière. A priori, les gens consomment de manière régulière ?
- si c'était le cas, la concentration des OD aurait lieu *autour* des saisies, et pas *après* (ici, je me fie aux conclusions de l'article, mais peut-être qu'une analyse aurait pu être différente)
- je ne sais pas si ça joue beaucoup, mais les périmètres d'action mesurés sont très petits (250 et 500m), donc avec peu de chance de créer des effets sur des "zones" à forte concentration de stupéfiants.
Un dernier point : il y a des politiques publiques de réduction des risques, qui permettent de sauver littéralement des vies d'usager.e.s : avoir la possibilité de vérifier la composition de sa drogue (par exemple sous forme d'un service gratuit), avoir des lieux dédiés et équipés en seringues neuves, conseils non-intrusifs pour les gens qui souhaitent arrêter, et du naloxone entre autres (le naloxone permet d'annuler les effets d'une overdose et donc de sauver la vie d'une personne). Je crois que le Portugal est connu pour avoir une politique proche de ça (quoi qu'avec encore des stigmatisations diverses, bref c'est améliorable) et c'est efficace : pas d'augmentation notable de la consommation, diminution notable des risques associés. En échange ils ont perdu la possibilité d'avoir des crétins virilistes au gouvernement qui jouent à taper de leur petit poing sur la table en annonçant des mesures qui n'auront comme principal effet de mettre en danger les consommateurs (sauf pour le tabac et l'alcool, où là on ne fait rien non plus et donc on laisse littéralement les gens en crever – Par an en France : tabac = 75000 morts, alcool = 49000 morts, toutes autres drogues confondues < 1000 morts)
Pour reboucler avec le thème du topic, ici encore on est dans une situation où un problème (de santé publique) a été intégré dans le périmètre d'action de la police, avec un bilan catastrophique, mais il semble complètement impossible de faire machine arrière… donc on subit ça désormais.
[ce message a été édité par Un
curieux le 21/03 à 10:00]