Arnold Schwartzenprout a écrit :> Des nouvelles d'Islande et d'enfouissement de CO2 atmosphérique : CLIC Intéressant ! Regardons au niveau quantitatif :
- cette usine a coûté entre 10 et 15 millions de dollars. (
Source)
- elle va capturer 4000 tonnes de CO2 par an. L'article se trompe et écrit
cela peut également être comparé à 4 000 vols Paris-New-York. Cela correspond en fait à 4000
passagers (voir
ici par exemple, mais l'info se retrouve à pas mal d'endroits). Du coup, c'est pas 4000 vols, mais 8 si tu comptes 500 passagers par Airbus(
Source). Pour info, des vols Paris New-York, il y en a une douzaine
par jourDe manière assez ironique, l'article wikipedia souligne qu'il faudrait, pour tenir leur engagement de réduire de 1% d'ici 2025, 250 000 usines comme celle qu'ils ont construit à Hinwil (
Source). Comme celle-ci est un peu moins de 5 fois plus efficace sur le papier, on arrive à 50 000 usines. Ils en sont à 14 sites.
Sur les autres sites, le CO2 est réutilisé immédiatement (comme engrais agricole, comprendre : on le remet dans l'air mais on espère qu'il fera pousser des légumes un peu avant, le bilan carbone de l'opération est un peu positif - mais pas grand chose, intuitivement, j'ai pas fait le calcul, et ça ne passe pas à l'échelle à cause du coût de transport ; ou bien pour gazéifier des boissons, auquel cas c'est rien de nouveau, c'est déjà ce qu'on fait, le CO2 va juste transiter par la boisson avant de retourner dans l'atmsophère).
Niveau énergétique, l'usine est basée près d'une centrale géothermique, et on pourrait donc dire que c'est tout clean. Sauf qu'il faudrait, pour un cycle de vie entier, compter :
- combien de temps l'usine va fonctionner, j'y reviens plus bas
- compter non pas l'apport de la centrale, puisque les habitants vont en être privés et risquent de se retourner à cause de ça vers du fossile (un peu moins de 20% du mix énergétique de l'Islande). Autrement dit : il faut compter que chaque Joule consommée par l'usine provient à 18% d'un joule pétrolier - et identifier l'empreinte carbone correspondante. J'avoue que j'ai un peu la flemme de le faire, mais ça diminuerait encore l'impact écologique de l'usine, fatalement.
- compter le coût de construction, de déplacement des équipes sur place (la compagnie est Suisse, le site en Islande), d'acheminement des matériaux.
Concernant la durée de vie, il y a déjà des sujets d'inquiétude dans l'article
« Il faut voir si les précipitations de minéraux carbonatés ne risquent pas de colmater les voies de circulation de l'eau, ce qui limiterait la portée de cette solution ».
Enfin, concernant le modèle économique, comme ce carbone là est figé dans le sol, niveau valeur ajoutée c'est rien du tout. Leur modèle consiste donc à vendre des "tonnes de dépollution" à des boites, qui vont inscrire ça sur leur bilan carbone. Le tout va leur coûter 600$ par tonne. Attention il y a un lièvre : il ne faut pas compter deux fois le CO2 fixé : si l'entreprise vend le CO2 fixé à Microsoft, ça veut dire que son bilan à elle ne peut pas en tenir compte. Et c'est piégeux, parce que même si cette entreprise émet autant de CO2 qu'elle n'en fixe, elle va faire passer pour plus verte une entreprise qui aura acheté du CO2 fixé. Au fait, quel est l'intérêt pour les entreprises d'acheter du "CO2 retiré" ? Vous l'aurez deviné : le greenwashing.
Question naïve pour conclure : pour 10 millions de dollars, on peut planter combien d'arbres ?
On peut avoir un ordre de grandeur
ici : « Every £25 donated helps us protect and care for an area of woodland that has the potential to secure roughly 1 tonne of CO2. ». Cela revient à 134 000$ pour 4000 tonnes, soit 100 fois moins que le prix de l'usine (il faudrait donc qu'elle dure 100 ans à coût de fonctionnement nul pour que ce soit intéressant, je vous laisse conclure
![[:]]](http://img7.kraland.org/s/04.gif)
).
N'hésitez pas à me dire si j'ai oublié des aspects dans l'analyse, j'ai fait ça vite fait parce que la conclusion me semblait évidente, je répète depuis un moment qu'il faut de l'analyse quantitative.
Pour rire, une dernière analyse comparative : imaginons qu'
un jour par an chaque adulte en France s'abstient de manger de la viande rouge. La consommation baisserait alors d'un 365e pour les personnes qui en mangent chaque jour, et de plus pour les personnes qui en mangent moins, je vais arrondir à 1/400e parce qu'il faut quand même manger quelque chose d'autre à la place. La baisse d'émission CO2 dans l'atmosphère serait alors de
55 millions de personne ×
650 kg eCO2 / an / personne × 1/400 soit environ 90 000 tonnes par an, soit déjà plus de 20 fois ce que propose ton usine. Et tu sais combien ça coûterait ?