Alors je suis allé lire de la littérature scientifique qui est plutôt du bord politique opposé au mien (https://sci-hub.se/10.1038/s43016-021-00276-y). Leur thèse est explicitement :
Our analysis suggests that a vegan diet is not compatible with organic agriculture (...) Livestock is key to sustaining food production. The redesign of livestock production would be a key production-side measure to sustain crop yields and thus food production
Ce qui est intéressant dans cet article c'est qu'il part de cette question fondamentale : si on réduit drastiquement les intrants chimiques (eux voient ça comme un choix politique, moi comme une nécessité liée aux ressources disponibles mais mettons cette question de côté pour le moment), comment nourrir l'humanité. Et du coup ils se placent sous l'angle de l'optimisation du nombre de calories produites en équilibrant les différents types de production complémentaires.
Conclusion numéro 1: avec le système actuel d'élevage, la totalité des sols agricoles (dont le rendement s'effondrerait suite au remplacement des intrants chimiques par les seuls intrants animaux) serait utilisés pour nourrir les bêtes. La production de calories globale serait insuffisante pour nourrir grosso modo la moitié de l'humanité.
Conclusion numéro 2: si on veut éviter un génocide d'une ampleur sans précédent dans l'histoire de l'humanité, il faut combiner les approches suivantes :
1) réduire notre consommation individuelle à 2 200 kCal/jour (soit le niveau actuel du Mali, du Soudan ou de la République Dominicaine, pour donner une idée)
2) réorienter l'élevage vers 85% de produit laitiers contre 10 % de viande (actuellement 57% vs 34 % en moyenne mondiale).
- > concrètement ils préconisent 28% des ressources agricoles consacrées à l'élevage, avec un taux de conversion de 40 %* donc on est sur 0.28*0.4*0.1*2200 = 25 KCal de viande/jour soit 1 steak
tous les dix jours.
3) réduire de moitié le gaspillage, fonctionner en polyculture partout etc etc
Et même avec ça on serait encore 20 % en deça de ce qu'il faudrait pour nourrir l'humanité.
Donc je ne vois pas comment ne pas être catastrophiste. D'autant que cet article ne tient compte que des limites en azote, sans prendre en compte la chute de productivité liée à l'abandon de la mécanisation quand les hydrocarbures seront trop rares et trop onéreux ou les autres types d'engrais.
* le taux de conversion énergétique de 40% pour de la viande est optimiste, mais il semble corroboré (dans le cadre d'une réorientation massive de l'élevage) par 'autres études comme https://productions-animales.org/article/view/2355 dans le cadre d'une transformation radicale de la nature des exploitations, en ce qui concerne les ovins et les porcs. Pour les poulets c'ets plutôt 30% et pour les bovins 15 %.