Megalion a écrit :> Tu te places dans une situation où ta position est impossible à vérifier.Bien sûr que si. L'existence de la police n'est pas une donnée binaire, et les comparaisons existent entre des pratiques et d'autres (c'est ce que fait Mucchielli, cité plus haut, d'ailleurs). C'est aussi ce que défendent les études qui regardent l'impact, sur le taux de criminalité, de telle ou telle politique publique. C'est enfin des choses qu'on peut inférer à partir de corrélations connues (par exemple, quand on connait le lien fort entre pauvreté et petite criminalité, une politique publique qui endigue la pauvreté aura certainement un impact meilleur sur la criminalité qu'une politique qui précarise encore plus la population, et le renforcement de la police est dans cette dernière catégorie).
Concernant tes sources, je note que le premier article ne parle absolument pas de définancement des « institutions - dont la police - », mais souligne des conséquences d'une instabilité politique dans des pays en crise. De manière amusante, si tu compares leur carte des pays africains où le nombre d'homicide par habitant est le plus élevé, tu obtiens en négatif la
carte du nombre de policier par habitant. C'est particulièrement criant en Afrique du Sud, d'ailleurs. Bref : il y avait ici dans cette citation un trou que tu as comblé avec tes idées, et certainement pas avec le contenu de l'article.
Concernant le contenu du livre, on peut souligner trois choses : primo, il traite de la situation dans des pays africains parfois en crise politique ou instabilité majeure, et tout n'est donc pas directement comparable. Secundo, il souligne que la majorité des homicides commis le sont dans un cadre familial. Difficile de penser que ce sont les équipement de sécurité, les milices ou les flics qui protègent les nouveaux nés contre leurs mères qui ne veulent pas d'enfant. Enfin, et c'est peut-être le plus important : la présence ou non de la police dans ces pays n'est jamais lié à un projet abolitionniste, mais entièrement à une capacité des états à financer des services publics. Ils soulignent que l'absence de police est liée à la corruption des fonctionnaires, ou à la pénurie d'argent de l'état. S'il est vrai qu'il parlent de "fonctionnaires plus disponibles pour lutter contre la criminalité", c'est davantage ce qui ressort de leur intuition que de leurs données, si j'ai bien lu.
Ah, et je note que je ne craque pas totalement, puisque quelques paragraphes après le tien, on peut lire : «
S'agissant de quatre autres pays d'Afrique de l'Ouest, nous constatons une forte baisse des homicides et, pourtant, dans ces pays, la gouvernance ne s'est nullement améliorée et même, dans le cas de la Guinée-Bissau, elle s'est dégradée. (...) Ces quatre pays dans lesquels la baisse très sensible des homicides semble déconnectée de la gouvernance étatique nous rappellent que la majorité des homicides prennent place dans la sphère privée, laquelle est peu touchée par la politique. C'est le cas des homicides familiaux et aussi des homicides querelleurs (qui opposent des voisins, des camarades et même des amis). ». Note que je ne partage pas leur avis sur "peu touchée par la politique", mais ce n'est pas si important ici.
Mais bon, encore une fois, si l'objectif de la police était de lutter contre la criminalité, il y aurait dans son organisation des défauts coupables (et pour commencer, la différence de traitement entre les délinquants en cols blancs et les autres), qui nécessiteraient une bonne réorganisation. Que cette réorganisation ne soit jamais évoquée laisse comprendre en creux que ce n'est pas là la mission de la police (ni son effet).